Le géant chinois de la tech, Alibaba, suspend les congés de ses ingénieurs en intelligence artificielle et transforme ses bureaux en dortoirs, dans une course effrénée pour rattraper son retard sur DeepSeek. 50 milliards de dollars sont mobilisés dans une offensive stratégique sans précédent.
En Chine, l’été 2025 ne rime pas avec farniente pour tout le monde. Chez Alibaba, les ingénieurs en intelligence artificielle vivent l’un des tournants les plus tendus de l’histoire du groupe. Congés annulés, matelas installés dans les open spaces, horaires intensifiés : le leader de la tech chinois joue sa crédibilité — et peut-être sa survie — dans une bataille algorithmique d’une intensité inédite, menée contre l’étoile montante du secteur, DeepSeek.
Longtemps confortablement installé dans le peloton de tête des champions de l’IA asiatique, Alibaba voit aujourd’hui sa suprématie menacée. DeepSeek, soutenu par d’importants fonds publics et bénéficiant d’un écosystème universitaire agile, multiplie les avancées spectaculaires dans le domaine des grands modèles de langage, gagnant du terrain sur les marchés domestique et international. La réponse d’Alibaba ? Une mobilisation interne totale, dans un style qui rappelle les grandes campagnes de productivité à la chinoise.
La direction du groupe a débloqué plus de 50 milliards dedollars pour renforcer ses infrastructures, accélérer le développement de ses modèles Tongyi Qianwen, et attirer des talents en provenance de Baidu, Huawei, ou encore de start-ups prometteuses de Shenzhen et de Singapour.
Mais cette offensive a un prix : le bien-être des salariés. Plusieurs ingénieurs ont confirmé à demi-mot, sous couvert d’anonymat, l’instauration de “rythmes militaires”, avec des “sprints de 21 jours sans repos” pour livrer les nouvelles versions des modèles. Le climat est tendu, la pression des résultats se fait sentir à tous les niveaux de la hiérarchie.
Du côté des investisseurs, les signaux sont ambivalents. Si certains saluent l’agilité et la réactivité d’Alibaba, d’autres s’inquiètent des méthodes extrêmes employées pour contrer une concurrence qui ne cesse d’accélérer. La valorisation du groupe en Bourse a connu une légère remontée après l’annonce de ce plan de relance, mais les analystes restent prudents : l’innovation ne s’impose pas à coups de sueur et d’heures supplémentaires, préviennent-ils.
En toile de fond, c’est le leadership technologique chinois qui se joue. À l’heure où les États-Unis misent sur OpenAI et Anthropic, et où l’Europe cherche encore son champion, la rivalité Alibaba-DeepSeek pourrait bien redessiner la carte mondiale de l’intelligence artificielle.
Course contre la montre ou contre les valeurs humaines ? La Chine montre une nouvelle fois qu’en matière d’innovation, la frontière entre ambition et obsession est aussi fine qu’un circuit imprimé.
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