Un juge fédéral de New York doit entendre ce mercredi 4 juin 2025 les arguments dans le procès Haitian Evangelical Clergy Association v. Trump, une affaire décisive qui remet en cause la décision controversée de l’administration Trump de réduire la durée du statut de protection temporaire (TPS) pour les ressortissants haïtiens vivant aux États-Unis.



La plainte a été déposée en mars 2025, à la suite de l’annonce de Kristi Noem, secrétaire à la Sécurité intérieure, qui a annulé la prolongation du TPS Haïti décidée par l’administration Biden. Au lieu d’un renouvellement jusqu’en février 2026, la nouvelle échéance fixée est le 3 août 2025, date à laquelle environ 521 000 Haïtiens perdront légalement leur droit de résider et de travailler sur le sol américain, sauf si le juge fédéral Brian Cogan, du district Est de New York, intervient pour bloquer cette mesure.

Les plaignants regroupent l’Association chrétienne évangélique haïtienne, plusieurs congrégations religieuses, le puissant syndicat SEIU Local 32BJ et neuf Haïtiens protégés par le TPS, dont plusieurs sont parents d’enfants citoyens américains. Ils dénoncent une décision « illégale, précipitée et politiquement motivée ». Selon eux, le Département de la Sécurité intérieure n’a pas respecté la loi TPS, qui exige une révision fondée sur des données concrètes et une évaluation rigoureuse des conditions dans le pays d’origine avant toute suppression du statut.

Ils allèguent également que cette initiative est teintée de discrimination raciale, en rappelant des déclarations antérieures de l’ancien président Donald Trump, dans lesquelles il décrivait Haïti et d’autres pays africains comme des « pays de merde », commentaires qui figurent dans le dossier juridique.

« La loi exige une analyse de bonne foi et fondée sur des preuves pour tout changement du statut d'Haïti – et cette norme n’a pas été respectée », a déclaré Manny Pastreich, président du SEIU 32BJ, dans un communiqué. Il prévient qu’une révocation précipitée mettrait en péril la stabilité de familles entières. « Que peut faire un parent haïtien dont l’enfant est citoyen américain ? Le ramener dans un pays où les gangs imposent leur loi, où l’extorsion est courante, ou le laisser ici seul ? », s’interroge-t-il.

Le statut de protection temporaire (TPS) est accordé à des ressortissants de pays en crise, qu’il s’agisse de catastrophes naturelles, de conflits armés ou d’effondrements institutionnels. Il leur permet de résider et de travailler légalement aux États-Unis pendant une période déterminée. En Haïti, la situation humanitaire reste alarmante : violences de gangs, effondrement du système de santé, pénuries alimentaires et déplacements internes massifs.

L’angoisse monte à l’approche de la date limite. De nombreuses familles haïtiennes, bien intégrées, redoutent un basculement soudain vers l’illégalité et la séparation familiale. Paul Christian Namphy, du Family Action Network Movement basé à Miami, rappelle qu’en 2017 et 2021, le sénateur Marco Rubio avait lui-même plaidé avec force pour le maintien du TPS haïtien lorsqu’il siégeait au sous-comité de l’hémisphère occidental au Sénat.

À moins d’un sursaut judiciaire ou politique, des centaines de milliers de vies sont suspendues à une décision que beaucoup qualifient déjà d’inhumaine et injustifiable. Pour les communautés haïtiennes aux États-Unis, ce mercredi à New York pourrait marquer un tournant décisif dans leur lutte pour la stabilité et la dignité.

Source : Miami Herald