Condition "D" : L'AMIDH Rappelle les Limites des Pouvoirs du Ministère de la Défense
Par Le Territorial    20 Juin 2024   
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Port-au-Prince, 20 juin 2024 – La récente directive du Ministère de la Défense visant à mettre les Forces Armées d'Haïti (FAd'H) en condition "D" a déclenché une vive réaction de l'Association Militaire d'Haïti (AMIDH), soulevant des questions cruciales sur les prérogatives et les procédures militaires en vigueur.
Dans une note adressée au Commandant en Chef des FAd'H, le Lieutenant-Général Jodel Lessage, en date du 18 juin 2024, le Ministère de la Défense, par l'intermédiaire de son Directeur Général, le Colonel Louis Marcelin Daniel, a ordonné de mettre les troupes en condition "D". Cette instruction, émanant du ministre de la Défense, a immédiatement été contestée par l'AMIDH, qui a rappelé les limites constitutionnelles et réglementaires de telles décisions.
Selon la Constitution de 1987 et les règlements généraux des FAd'H, le commandant en chef des forces armées relève directement du président de la République et non du ministre de la Défense. Cette règle est cruciale pour préserver la chaîne de commandement militaire et éviter toute ingérence politique dans les décisions opérationnelles.
L'intervention de l'AMIDH
L'Association Militaire d'Haïti a vivement réagi, soulignant que le ministre de la Défense n'a pas l'autorité de mettre les troupes en condition "D", malgré son rôle de tutelle. La terminologie militaire précise que la "Condition D" (DEFENSE READINESS CONDITION ou DEFCON) est un niveau d’alerte qui varie de D5 (normal) à D1 (guerre). En pratique, cette condition implique la présence physique des troupes dans les bases ou casernes, une mesure difficile à mettre en œuvre compte tenu des infrastructures limitées des FAd'H.
Depuis 2017, les FAd'H ne disposent que du Quartier Général (GQG) et de l'espace de Léogâne laissé par les Coréens, qui ne sont pas équipés pour accueillir les 2 000 soldats en termes de structures sanitaires, culinaires et de dortoirs. Ainsi, la mise en condition D exigerait un retour massif des troupes actuellement déployées au port de Port-au-Prince et à l’aéroport vers ces bases inadéquates.
Problèmes de Procédure et de Commandement
L'AMIDH a également critiqué la méthode de transmission de l'ordre. Une telle directive devrait être signée par le commandant en chef ou par le président de la République et non par un directeur général de grade inférieur, soulignant une usurpation de rôle. De plus, la divulgation de cette correspondance interne sur les réseaux sociaux constitue une faute grave passible de Cour Martiale ou de révocation immédiate, selon l'AMIDH.
Conséquences et Incertitudes
Cette situation a créé une incertitude palpable au sein des FAd'H et de l'opinion publique. Un bras de fer semble s'annoncer entre les FAd'H et leur ministère de tutelle. Le commandant en chef des forces armées va-t-il suivre cette directive controversée ou maintiendra-t-il son autorité constitutionnelle en refusant de mettre les troupes en condition "D"?
Le débat souligne l'importance de respecter les prérogatives établies par la Constitution et les règlements militaires pour maintenir la stabilité et l'efficacité des forces armées dans un contexte de sécurité nationale fragile. La décision finale du commandant en chef sera scrutée de près et pourrait avoir des implications significatives pour l'avenir de la gouvernance militaire en Haïti.
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