Quand les mots rassurent, mais que les actes trahissent : le cynisme du gouvernement haïtien face au calvaire du peuple et des migrants de retour.
“Lakay se lakay, lakay ap toujou lakay” : telle est la phrase lancée avec assurance par Kathia Verdier, ministre des Haïtiens vivant à l’étranger (MHAVE), dans un discours censé apaiser les craintes des compatriotes menacés d’expulsion par les autorités américaines. Mais sous ce slogan réconfortant en apparence, se cache une réalité amère, celle d’un État déconnecté, qui banalise la souffrance, ignore les urgences, et camoufle son irresponsabilité sous des mots creux.
Alors que des milliers d’Haïtiens bénéficiaires du TPS (Temporary Protected Status) ou du programme humanitaire de l’administration Biden vivent dans la crainte d’être renvoyés dans un pays où gangs armés, famine, absence d’institutions stables et désespoir social sont devenus le quotidien, le gouvernement haïtien ose minimiser l’enfer vécu sur le sol national avec un discours de façade.
Kathia Verdier affirme que le gouvernement “prend des dispositions” pour accueillir ces Haïtiens “avec dignité”. Mais où sont les infrastructures d’accueil ? Où sont les logements ? Où sont les mécanismes de réinsertion ? Où est la sécurité ? Port-au-Prince est à feu et à sang, des milliers de personnes sont déplacées, les écoles ferment, les hôpitaux sont assiégés, et les aéroports servent davantage à fuir qu’à rentrer.
Ce discours ne reflète pas une stratégie, mais un aveuglement complice. À défaut d’avouer l’incapacité à offrir un avenir viable à ses citoyens, le gouvernement s’arroge un vernis de respectabilité diplomatique tout en sacrifiant les siens sur l’autel de l’imposture.
Les déclarations de la ministre ne sont pas seulement irréalistes. Elles traduisent une forme de mépris pour la douleur des familles haïtiennes, pour les mères qui fuient la violence avec leurs enfants, pour les jeunes qui cherchent une vie meilleure loin des balles, de la faim, et de la peur.
Pendant que des gouvernements étrangers s’apprêtent à renvoyer de force des milliers de compatriotes dans un pays sans refuge, le MHAVE ne propose qu’un discours vide, des promesses non chiffrées, sans mesures concrètes ni consultations sérieuses avec la diaspora.
Au lieu d’élaborer une politique publique responsable, inclusive et coordonnée avec les partenaires internationaux et les organisations de la société civile, le gouvernement haïtien préfère l’illusion du contrôle, la rhétorique vide, et le mépris pour la vérité.
Dans une telle situation, ce n’est pas le retour des Haïtiens qui doit être préparé, c’est d’abord la reconstruction d’un pays digne d’être appelé "lakay". Et pour cela, il faut une volonté politique réelle, des actes concrets, des institutions fonctionnelles et surtout le respect de la vie humaine.
Car “lakay” ne peut pas être un lieu d’exil intérieur, un territoire abandonné aux gangs, une patrie humiliée et vendue à l’impuissance d’un régime cynique.
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