Alors que la nation traverse une crise institutionnelle majeure, le nouveau budget rectificatif 2024-2025 alloue 3,5 milliards de gourdes à un Parlement inexistant, illustrant une gestion publique opaque et profondément déconnectée des urgences sociales du pays.



La transparence budgétaire et la reddition de comptes demeurent des piliers fondamentaux dans toute démocratie. Pourtant, en Haïti, la corruption systémique continue de saper les fondations de l'État et d'hypothéquer l’avenir des générations futures. Le projet de budget rectificatif de l’exercice fiscal 2024-2025, estimé à 323,4 milliards de gourdes, en est une preuve flagrante.

Dans ce document officiel, l’État haïtien prévoit d’allouer 3,5 milliards de gourdes à un Parlement qui n’existe plus depuis plusieurs années, un organe institutionnel devenu purement symbolique depuis le départ des derniers dix sénateurs en janvier 2023. Dans le détail, 1,7 milliard de gourdes sont prévus pour le Sénat et 1,8 milliard pour la Chambre des députés, malgré leur inactivité totale.

Cette situation soulève de graves interrogations sur la gestion des finances publiques dans un pays confronté à des défis majeurs : insécurité galopante, crise humanitaire, effondrement du système de santé, éducation en déshérence, infrastructures délabrées. Allouer des milliards à des institutions fantômes, alors que des millions d’Haïtiens vivent dans l’extrême pauvreté, représente un affront à la justice sociale et à la morale républicaine.

La corruption n’est pas seulement une défaillance morale, c’est un mécanisme sophistiqué de captation des ressources publiques par une minorité, au détriment de l’intérêt général. Elle prive les hôpitaux de médicaments, les écoles d’enseignants, les quartiers d’eau potable, les jeunes d’opportunités.

Il est donc urgent de faire de la lutte contre la corruption la priorité de notre génération. Cela suppose une réforme profonde de l’administration publique, la mise en place d’organes de contrôle indépendants, la publication en temps réel des dépenses de l’État et des mécanismes de sanctions exemplaires pour les auteurs de malversations.

Sans reddition de comptes, il ne peut y avoir de développement durable ni de justice sociale. Le peuple haïtien mérite un État responsable, redevable et centré sur les véritables besoins de la nation. La lutte contre la corruption n’est pas une option politique ; c’est la condition même de la survie de notre démocratie et de l’avenir de nos enfants.