Un an après l’arrivée de son premier contingent en Haïti, le Kenya alerte l’ONU sur un possible retrait de la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MMSS), dénonçant un manque de soutien international criant.



La solidarité internationale vacille. Dans une lettre adressée au président du Conseil de sécurité de l’ONU, Mohamed Irfaan Ali, et au secrétaire général António Guterres, le président kényan William Ruto tire la sonnette d’alarme : le Kenya envisage de se retirer de la MMSS si la communauté internationale ne respecte pas ses engagements financiers et logistiques. À ce jour, seuls 68 millions de dollars, soit à peine 11 % des 600 millions promis, ont été débloqués. Côté effectifs, seuls 40 % des troupes prévues sont déployées.

Lancé avec espoir il y a un an, le déploiement de 400 policiers kenyans avait pour objectif de contenir une insécurité galopante en Haïti. Mais douze mois plus tard, le constat est accablant : sur les 2 500 soldats annoncés, seuls 991 sont sur le terrain, et neuf des douze bases opérationnelles prévues n’ont pu voir le jour. Le Kenya, pilier central de cette mission, avertit qu’il « est contraint de réévaluer son engagement », appelant à une réponse urgente avant la fin du mandat actuel de la mission.

Cette menace de retrait intervient alors que la situation sécuritaire en Haïti ne cesse de se dégrader. Dans un rapport publié le 25 juin, l’organisation Human Rights Watch (HRW) appelle à transformer la MMSS en une véritable mission onusienne dotée de ressources adéquates. Le document dépeint une crise humanitaire sans précédent : 2 680 morts et 957 blessés en un an, selon les Nations unies. 1,3 million de déplacés internes, soit 11 % de la population, fuient les violences de gangs omniprésents à Port-au-Prince et dans les villes de l’intérieur.

Les enfants haïtiens payent un lourd tribut. En 2024, 2 269 cas de violences graves ont été recensés, contre 383 l’année précédente. Violences sexuelles, enlèvements, recrutements forcés par des bandes armées… le chaos sécuritaire touche toutes les strates de la société.

Malgré le soutien de pays comme le Guatemala, El Salvador, la Jamaïque et les Bahamas, les contributions internationales restent très en deçà des promesses. Face à cette impasse, le Conseil de sécurité de l’ONU a convoqué une réunion spéciale le 30 juin, suite à une lettre du président dominicain Luis Abinader, cosignée par trois anciens chefs d’État de la République dominicaine, exigeant une action urgente pour éviter l’effondrement total du pays voisin.

Le possible retrait du Kenya, acteur clé de la MMSS, serait un revers majeur pour la sécurité en Haïti. Il symbolise l’essoufflement d’un effort collectif fragmenté, au moment où Haïti a plus que jamais besoin d’une réponse ferme, solidaire et coordonnée de la communauté internationale.