Alors que les raids d’ICE se multiplient à travers le pays, les écoles américaines doivent désormais composer avec un absentéisme massif lié à la peur des expulsions. Un phénomène qui touche particulièrement les élèves issus de familles immigrées en situation irrégulière, et qui met en péril leur réussite scolaire.



Depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, la pression sur les communautés immigrées s’est intensifiée. Et cette pression n’épargne pas les plus jeunes : les élèves sans papiers ou issus de familles en situation irrégulière désertent les salles de classe. Une récente étude de l’université de Stanford révèle que les raids menés par Immigration and Customs Enforcement (ICE) entraînent une hausse de 22 % des absences scolaires, particulièrement dans les quartiers à forte population latino-américaine.

Les chiffres sont sans appel : en Californie, cinq districts scolaires ont vu les absences bondir en janvier et février 2025, comparé aux mêmes mois des années précédentes. Chez les élèves de maternelle, l’absentéisme atteint 30 %, et même 8 % chez les lycéens. Ce phénomène s’est accentué après les opérations massives d’ICE à Los Angeles, qui ont suscité de vives protestations et une réponse militaire ordonnée par Trump lui-même.

Pour les professionnels de l’éducation, la peur est devenue un frein à l’apprentissage. « Ce n’est pas seulement la peur de voir des agents fédéraux entrer dans les écoles, c’est l’impact psychologique sur les familles qui craint de se déplacer », explique Viridiana Carrizales, fondatrice d’ImmSchools, une organisation spécialisée dans la scolarisation des enfants de familles migrantes.

Le transport scolaire est particulièrement concerné. De nombreux parents, craignant de croiser ICE sur le chemin de l’école, préfèrent garder leurs enfants à la maison. Des ajustements logistiques pourraient donc être nécessaires, estiment les experts.

Tara Thomas, responsable des affaires publiques à l’Association des surintendants scolaires, insiste sur la nécessité d’une communication claire et rassurante entre les établissements et les familles. « Les écoles doivent expliquer les mesures de protection en place et rassurer sur la confidentialité des données des élèves », plaide-t-elle.

Même si les écoles K-12 ne sont pas, en principe, des cibles prioritaires pour les interventions d’ICE, l’incertitude juridique plane, surtout après que l’administration Trump a levé des directives protégeant les établissements de ce type d’opérations.

La situation est d’autant plus préoccupante que l’absentéisme chronique est déjà un fléau hérité de la pandémie de COVID-19. Le think tank Future Ed estime qu’il a concerné 28 % des élèves en 2021-2022, 25 % en 2022-2023, et encore 23 % en 2023-2024. Un phénomène qui entraîne inévitablement des baisses de niveau, de motivation et des taux de diplomation en chute libre.

Carl Felton, analyste à l’organisation EdTrust, rappelle que l’essentiel reste la création d’un climat de confiance. « Les familles doivent sentir que l’école est un lieu sûr, un sanctuaire. Que leurs enfants seront protégés, même si eux ne le peuvent pas », insiste-t-il.

Mais dans certains États républicains où les autorités soutiennent ouvertement les politiques d’expulsion, les écoles se retrouvent dans une position délicate. « Le silence de nombreux districts scolaires est un vrai problème. L’inaction fait fuir les familles, et compromet l’accès à l’éducation pour les plus vulnérables », déplore Carrizales.

Avec la rentrée qui approche, le défi pour le système éducatif américain sera de taille : rassurer, protéger et garantir le droit à l’éducation, même dans un climat d’hostilité croissante envers les immigrés.