Dans une escalade judiciaire sans précédent, l’administration Trump attaque une cour fédérale du Maryland pour avoir suspendu temporairement les expulsions de migrants en situation irrégulière.
Le ministère de la Justice dirigé par Pam Bondi a intenté une action en justice contre les juges fédéraux du district du Maryland, les accusant d’« excès de pouvoir anticonstitutionnel » pour avoir ordonné un sursis de 48 heures avant toute expulsion d’un migrant ayant déposé un recours contre sa détention. Cette mesure, selon le ministère, freine la capacité de l’exécutif à appliquer efficacement les lois sur l’immigration.
« Ce procès n’est que la dernière action de @AGPamBondi pour freiner les abus judiciaires », a affirmé Chad Gilmartin, porte-parole du ministère, sur le réseau X (anciennement Twitter), illustrant le ton offensif adopté par l’administration dans ce conflit d'autorité.
À l’origine de cette tension : l’affaire très médiatisée de Kilmar Ábrego García, un ressortissant salvadorien expulsé illégalement par l’administration avant d’être renvoyé aux États-Unis sur ordre de la Cour suprême. Depuis, il fait l’objet de poursuites fédérales pour trafic d’immigrants clandestins. Le juge Paula Xinis, chargé de l’affaire, envisage de sanctionner des responsables fédéraux pour avoir ignoré une injonction de libération. Une décision qui n’a manifestement pas plu à la Maison-Blanche.
Le ministère de la Justice considère l’ordonnance émise par le juge en chef George Russell comme « illégale et antidémocratique », accusant la cour de perturber l’exécution des politiques migratoires. Le procès vise ainsi l’ensemble du banc judiciaire fédéral du Maryland, une initiative rarissime qui révèle la pression politique grandissante sur l’indépendance des tribunaux.
Dans sa plainte, le gouvernement affirme que « le pouvoir judiciaire ne peut pas s’arroger des fonctions exécutives sous prétexte de commodité ou de frustration ». En d'autres termes, il rejette toute intervention des juges dans la mécanique des expulsions, même temporaire.
La riposte ne s’est pas fait attendre. Le gouverneur démocrate du Maryland, Wes Moore, a dénoncé une tentative d’intimidation grave contre les institutions : « Après avoir ignoré des ordonnances judiciaires et attaqué personnellement des juges, la Maison-Blanche tente maintenant de renverser notre Constitution en attaquant le pouvoir judiciaire lui-même. »
Le contexte de ce bras de fer s’inscrit dans une stratégie plus large de l’administration Trump visant à accélérer les expulsions et à limiter les contre-pouvoirs juridiques. La récente décision de la Cour suprême autorisant les expulsions vers des pays tiers sans procédure renforcée, même si ce ne sont pas les pays d’origine des migrants, semble avoir ouvert la voie à une offensive plus agressive.
Mais cette volonté de contrôler la justice risque d’ouvrir une crise institutionnelle majeure. Juristes, défenseurs des droits humains et élus démocrates s’inquiètent de la dérive autoritaire que pourrait prendre ce conflit si l’indépendance du pouvoir judiciaire venait à être compromise.
Avec cette procédure historique, Donald Trump confirme que l’immigration restera un axe central — et hautement conflictuel — de son agenda politique, quitte à bousculer les fondements mêmes de la séparation des pouvoirs.
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