Confrontée à l’impasse sécuritaire et politique persistante en Haïti, la Caricom multiplie les efforts pour raviver un dialogue national inclusif. Le Conseil présidentiel de transition (CPT), accusé d’inefficacité, est de plus en plus contesté par les forces politiques et la société civile.



Alors que l’insécurité continue de paralyser Haïti et que l’organisation des élections reste au point mort, la Communauté des Caraïbes (Caricom) tente de remettre sur les rails un processus politique jugé moribond. Son Groupe des éminentes personnalités (GPE) mène, depuis quelques jours, une série de consultations discrètes avec des responsables politiques haïtiens et des représentants de la société civile, dans l’espoir de raviver un dialogue inclusif.

Ces échanges s’inscrivent dans un contexte d’échec criant du Conseil présidentiel de transition (CPT), structure née de l’accord du 3 avril 2024, et dont l’incapacité à rétablir la sécurité ou à avancer vers des élections suscite une profonde frustration.

Parmi les acteurs approchés, l’avocat et homme politique André Michel, figure de l’accord du 21 décembre, a confirmé avoir rencontré les émissaires de la Caricom. Selon lui, il s’agit d’une tentative pour « corriger le cap » d’une transition politique en déroute. « La reprise des discussions permettra de dresser un diagnostic collectif et de prendre des décisions structurantes, avec l’appui de la communauté internationale », a-t-il déclaré au Nouvelliste, soulignant l’urgence d’une solution avant février 2026, date prévue pour la fin de la transition actuelle.

Jean André Victor, du Collectif du 30 janvier, a également confirmé des échanges, tout en précisant qu’aucun calendrier ni ordre du jour n’avait encore été fixé. « Ils explorent encore les options. La tenue de discussions dépendra de la réaction des différents protagonistes », a-t-il résumé.

L’ancien premier ministre Claude Joseph, aujourd’hui dirigeant du parti EDE, a aussi été sollicité. Il affirme que la communauté internationale manifeste un malaise croissant face à l’inefficacité du CPT. « EDE est prêt à s’impliquer dans toute initiative visant à sortir de la crise. Nous avons même écrit à la Caricom pour qu’une solution soit trouvée avant février 2026 », a-t-il affirmé.

Côté société civile, Me Gédéon Jean, directeur du Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH), a été consulté par le GPE. Le quotidien Le Nouvelliste rapporte aussi que Fanmi Lavalas aurait été approché, même si cette information n’a pas été officiellement confirmée.

À ce stade, aucune date officielle ni cadre de discussion n’a été défini par la Caricom. Une incertitude demeure quant à l’inclusion d’acteurs non signataires de l’accord du 3 avril 2024, alors que la légitimité du Conseil présidentiel est de plus en plus remise en cause.

Dans une récente intervention sur la chaîne CTN, Me André Michel avait déjà annoncé que des démarches étaient en cours pour relancer les discussions politiques et sécuritaires. « Je peux vous dire que les jours de ce CPT sont comptés », avait-il lancé, en écho à une opinion largement partagée au sein de la classe politique haïtienne.

Alors que la population haïtienne s’enfonce dans la précarité, entre insécurité généralisée et crise humanitaire, les appels à un sursaut collectif se multiplient. La Caricom espère désormais que ce regain de dialogue permettra d’éviter l’implosion d’un pays en quête de gouvernance stable et de justice sociale.