Face à la violence grandissante des gangs, les médias haïtiens luttent pour leur survie. Menaces, assassinats, incendies criminels : une offensive systématique contre la liberté de la presse menace d'étouffer la voix d'une nation en crise.
Haïti, jadis berceau d’une presse vibrante et engagée, assiste aujourd’hui à l’une des pires attaques contre sa liberté d’expression. Dans un climat d’insécurité extrême, les journalistes sont devenus des cibles préférentielles pour des bandes criminelles qui cherchent à imposer leur loi du silence. Deux reporters abattus en plein reportage, des stations de radio et de télévision incendiées, des journalistes contraints à l’exil ou au silence : le constat est alarmant.
L’offensive des gangs ne relève pas du hasard. Elle s’inscrit dans une stratégie calculée visant à réduire au silence les derniers contre-pouvoirs qui subsistent dans un pays où les institutions s'effondrent les unes après les autres. Dans un contexte où 85 % de la capitale est sous le contrôle de groupes armés, l’information libre et transparente représente une menace pour ces organisations criminelles, mais aussi pour les acteurs politiques qui bénéficient du chaos.
Si la presse haïtienne a toujours su résister aux assauts du pouvoir et aux coups d’État, la situation actuelle atteint un niveau inégalé de brutalité. L’ONU, par la voix d’Eric Voli Bi, lance un cri d’alarme sur l’urgence d’agir. L’UNESCO tente d’apporter un soutien aux journalistes, notamment par des programmes de soutien psychologique et des initiatives de protection. Mais cela suffit-il ?
La résilience seule ne garantit pas la survie. Pour que le journalisme haïtien ne disparaisse pas sous les balles et les flammes, il faut une mobilisation massive. Les organisations internationales doivent réagir avec des actions concrètes : financement, formations en sécurité, fourniture d’équipements de protection. De leur côté, les autorités haïtiennes doivent rompre avec la passivité et s’attaquer à l’impunité qui règne. Car sans presse libre, Haïti court à l'aveugle vers un gouffre encore plus profond.
L'histoire jugera ceux qui, aujourd'hui, décident de se taire ou de parler. Mais une chose est certaine : un pays sans médias libres est un pays enchaîné. Haïti ne peut se permettre un tel destin.
PHOTO: Ralph Tedy Erol
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