Depuis Brasilia, lors du sommet Brésil-Caraïbes, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva dénonce l’abandon prolongé d’Haïti par la communauté internationale et exhorte à une mobilisation globale pour un plan de redressement économique et social.
Au cœur du sommet Brésil-Caraïbes tenu à Brasilia ce 13 juin 2025, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a frappé un grand coup en mettant Haïti au centre de l’agenda géopolitique et économique régional. Dans un discours passionné, Lula a qualifié l’attitude de nombreux gouvernements mondiaux de « punition historique » infligée à Haïti, un pays selon lui « abandonné » pour avoir osé être le premier à abolir l’esclavage et conquérir son indépendance.
Revenant sur ses propos tenus en France une semaine plus tôt, Lula a interrogé avec vigueur : « Quel péché Haïti a-t-elle commis ? » avant de dénoncer une longue tradition d’ingérence puis d’indifférence. Pour le président brésilien, cette posture constitue un frein majeur à la stabilisation d’un pays qui continue de subir les effets cumulatifs de l’insécurité, de la pauvreté et du sous-investissement chronique.
Dans une approche pragmatique, Lula a appelé à la construction d’un véritable plan national de développement pour Haïti, soutenu par des partenaires internationaux crédibles, dont l’ONU et la Banque interaméricaine de développement. Le Brésil, a-t-il affirmé, est prêt à jouer un rôle central, notamment par la mise en place de programmes sociaux, de transferts de revenus et de renforcement des capacités, à commencer par la formation de 400 policiers haïtiens par la police fédérale brésilienne.
Concernant la sécurité, Lula a insisté sur la nécessité urgente de stabiliser le pays, condition sine qua non à la tenue d’élections présidentielles et à la relance économique. Il a soutenu une transformation de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en mission onusienne de maintien de la paix, afin de garantir une force crédible et durable sur le terrain. Cette proposition, bien accueillie par une majorité de membres de l’ONU, se heurte encore aux réserves de la Chine et de la Russie.
Le président brésilien n’a pas manqué de rappeler les efforts concrets déjà consentis par son pays : 14 ans de commandement de la MINUSTAH, un don de 55 millions USD après le séisme de 2010, plus de 90 000 visas humanitaires délivrés aux Haïtiens depuis 2012, ainsi que l’inauguration du centre professionnel Paulo Freire aux Cayes.
Dans un contexte de repositionnement stratégique mondial, où les ressources humaines et la stabilité géopolitique deviennent des facteurs déterminants de croissance, le message de Lula résonne comme un appel à la responsabilité collective. En reliant la situation d’Haïti aux enjeux de justice historique, de souveraineté économique et de solidarité régionale, il redonne une voix à un pays souvent réduit à un simple objet de discours humanitaire.
Avec ce sommet placé sous le thème « Aproximar para unir » (Rapprocher pour unir), Lula tente de transformer l’empathie en engagements concrets. L’histoire jugera si cette initiative aura suffi à inverser le cours d’un abandon séculaire, ou si Haïti continuera de porter seule le poids de sa propre émancipation.
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