Ancien avocat personnel de Donald Trump et haut responsable controversé du ministère de la Justice, Emil Bove est accusé d’abus de pouvoir et de compromission de l’indépendance judiciaire. Son profil suscite une levée de boucliers sans précédent dans les milieux juridiques.



Le nom d’Emil Bove, proposé par le président Donald Trump pour siéger à vie à la Cour d’appel fédérale du 3e circuit, fait trembler les murs du Sénat américain. Ce mardi 15 juillet 2025, plus de 75 anciens juges fédéraux et d’État ont signé une lettre ouverte exhortant le Sénat à rejeter sa nomination, invoquant des inquiétudes graves sur son comportement, son éthique et son respect de la Constitution.

« Son bilan est incompatible avec les exigences fondamentales de l’intégrité judiciaire », peut-on lire dans cette missive adressée à la commission judiciaire du Sénat. L’ancien haut fonctionnaire du ministère de la Justice est notamment accusé d’avoir maltraité des agents fédéraux, ignoré délibérément des ordonnances judiciaires, et utilisé son poste pour faire avancer l’agenda politique de Donald Trump, notamment en matière d’immigration.

Un lanceur d’alerte, l’ancien avocat du ministère Erez Reuveni, affirme que Bove aurait explicitement planifié des actions illégales visant à contourner les décisions des tribunaux afin de faciliter des expulsions massives. Il a proposé de témoigner sous serment devant le Sénat, preuve supplémentaire que le dossier est explosif.

Durant son audition du 25 juin dernier, Emil Bove s’est défendu avec véhémence, niant les accusations de corruption : « Je ne suis le bras armé de personne. Je suis un simple avocat issu d’une petite ville. »

Mais pour de nombreux magistrats – y compris ceux nommés par des présidents républicains comme George H.W. Bush – sa proximité avec Donald Trump soulève une question éthique majeure. Le juge J. Michael Luttig, figure respectée du conservatisme judiciaire, a pris position contre la nomination de Bove.

Outre ses activités comme procureur à New York, Emil Bove a rejoint l’équipe juridique de Trump en 2023, participant à plusieurs dossiers judiciaires majeurs. Une fois Trump revenu à la Maison Blanche en janvier 2025, Bove a rapidement été nommé procureur général adjoint par intérim, où il a opéré un virage musclé dans la politique du département, déclenchant une vague de démissions internes.

Le vote de confirmation du Sénat est attendu ce jeudi. Le sénateur républicain Thom Tillis, voix modérée influente, s’est dit « enclin à soutenir » la nomination, malgré le fait que Bove n’ait pas explicitement condamné les violences du 6 janvier 2021.

Pour les signataires de la lettre, cette nomination serait un précédent dangereux : « Cela compromettrait l’intégrité de notre justice et enverrait le signal qu’un poste à vie à la magistrature fédérale peut être une récompense de loyauté personnelle, plutôt qu’un engagement envers la Constitution. »

Si confirmé, Emil Bove siégerait dans un circuit influent couvrant la Pennsylvanie, le New Jersey, le Delaware et les îles Vierges américaines. Une perspective qui, pour ses détracteurs, pourrait durablement affaiblir la confiance des citoyens envers l’indépendance du pouvoir judiciaire aux États-Unis.

Source : CNN