Face aux menaces économiques proférées par Donald Trump, le Brésil opte pour un virage stratégique vers le multilatéralisme, renforçant son ancrage dans les BRICS et dénonçant l’unilatéralisme américain comme une nouvelle forme d’ingérence impériale.
Brasília n’a pas tardé à réagir. Menacé de sanctions commerciales massives par l’ex-président américain Donald Trump, le Brésil a officiellement déclaré vouloir accélérer son intégration stratégique au sein des BRICS, ce bloc émergent de puissances économiques composé notamment de la Chine, la Russie, l’Inde, l’Afrique du Sud et de plusieurs nouveaux membres comme l’Iran ou les Émirats arabes unis.
Dans un entretien accordé au Financial Times, Celso Amorim, conseiller spécial du président Lula da Silva pour les affaires internationales, a condamné les propos de Donald Trump, dénonçant « une forme d’interventionnisme sans précédent ». En ligne de mire : des droits de douane punitifs de 50 % envisagés par le candidat républicain à la présidentielle 2025, couplés à une exigence jugée inacceptable — l’arrêt pur et simple des poursuites judiciaires visant Jair Bolsonaro.
Ce que Washington présente comme une stratégie protectionniste, Brasília l’interprète comme une menace directe à sa souveraineté politique et économique. « Même à l’époque coloniale, les États-Unis n’étaient pas allés aussi loin », déplore Amorim. Et d’ajouter : « Trump n’a ni alliés, ni logique stratégique. Il agit par pur caprice. »
Le message est clair : le Brésil ne veut plus dépendre de la seule Amérique du Nord. À travers ce nouvel alignement géopolitique, le pays affirme vouloir diversifier ses relations commerciales et renforcer son autonomie stratégique, s’appuyant sur les BRICS comme levier d’un monde multipolaire. Une riposte économique équivalente est d’ores et déjà envisagée si les États-Unis concrétisent leurs menaces tarifaires.
Sur le plan commercial, la Chine reste le principal partenaire du Brésil, avec plus de 94 milliards de dollars d’échanges en 2024 — notamment dans les secteurs agricole, énergétique et minier. Mais Brasília prend soin de nuancer : « Il ne s’agit pas de favoriser Pékin, mais d’équilibrer nos dépendances », insiste Amorim.
Dans ce contexte tendu, le Brésil envoie également un signal à l’Europe, appelant à la ratification rapide de l’accord Mercosur-UE, qui dort depuis des années dans les tiroirs bruxellois. Un rapprochement qui pourrait rééquilibrer les forces dans un monde commercial fragmenté par les rivalités sino-américaines.
Lula da Silva, fort de son positionnement global, se veut le porte-voix du sud global et du multilatéralisme rénové. Car au-delà des enjeux commerciaux, il s’agit pour le Brésil de défendre une vision du monde plus équilibrée, moins dominée par une seule puissance, et d’entrer pleinement dans une nouvelle ère géoéconomique où les rapports de force ne sont plus dictés unilatéralement par Washington.
La diplomatie brésilienne vient de le rappeler avec fermeté : le temps de la vassalité est révolu.
Laisser un commentaire