Trump signe un partenariat économique historique avec l’Arabie saoudite : IA, défense, énergie… les enjeux sont colossaux. Derrière l’euphorie des milliards et des promesses d’emplois, se dessine une alliance toxique entre élites compradores, multinationales prédatrices et politiciens corrompus, prêts à redessiner le monde sous l’emprise de la techno-finance.



Donald Trump, fidèle à sa logique transactionnelle, vient de conclure à Riyad l’un des partenariats économiques les plus symboliques de ce début de siècle. En scellant une série d’accords avec le prince héritier Mohammed ben Salmane dans les domaines de l’intelligence artificielle, de la défense, de l’énergie et des minerais critiques, l’ancien président américain injecte une nouvelle dynamique dans les relations américano-saoudiennes, mais surtout dans l’ordre économique mondial en gestation.

Ce que beaucoup qualifient de succès diplomatique cache en réalité une manœuvre bien plus profonde : la fusion stratégique du capitalisme algorithmique occidental avec les élites compradores du Golfe, prêtes à monnayer leur souveraineté contre l’accès à la haute technologie. La présence d’un aréopage impressionnant de PDG américains — Elon Musk, Sam Altman, Jensen Huang, Andy Jassy, Larry Fink, Arvind Krishna — n’était pas qu’une vitrine protocolaire, mais la preuve vivante d’un pacte d’intérêts entre politique, finance et technologie.

L’intelligence artificielle devient ici le socle d’une nouvelle économie extractive, non plus fondée sur le pétrole brut, mais sur la donnée, la surveillance, la puissance de calcul. L’Arabie saoudite, propulsée acteur majeur de l’IA grâce à Vision 2030, ambitionne désormais de contrôler une partie des chaînes de valeur numériques mondiales, tout en s’assurant la bénédiction de Washington. En échange, les États-Unis espèrent récupérer investissements, contrats géants et – selon Trump – créer jusqu’à deux millions d’emplois sur leur sol. Le calcul est limpide : exporter les puces, importer le cash.

Mais cette mise en scène économique cache un visage bien plus inquiétant : celui d’un capitalisme de connivence planétaire, où les décisions ne se prennent plus dans l’intérêt des peuples mais au service d’une minorité d’acteurs transnationaux. Les bourgeoisies compradores, ces classes dominantes locales sans projet productif national, ne sont ici que les relais d’une expansion technologique dirigée de l’extérieur. Elles légitiment la dépossession numérique au nom de la modernité.

Les politiciens corrompus trouvent, dans ces grandes messes diplomatiques, l’opportunité de maquiller leur autoritarisme sous les couleurs de l’innovation. Ils négocient des contrats en IA pendant que leur peuple manque d’éducation numérique de base. Ils importent des centres de données sans créer d’universités capables de produire des ingénieurs locaux. Leur stratégie est claire : dépendance technologique en haut, répression sociale en bas.

Cette diplomatie économique, portée par l’administration Trump, n’est donc pas un simple exercice commercial. Elle reflète une reconfiguration des rapports de force globaux, où la souveraineté est monnayée, l’IA est militarisée, et les grandes firmes dictent les priorités stratégiques des États. L’intelligence artificielle, censée libérer les capacités humaines, devient le cheval de Troie d’une nouvelle forme de domination : le techno-impérialisme.

Pendant ce temps, des pays comme Haïti, le Congo ou le Venezuela restent en marge de ces grands partages, faute d’infrastructures, mais surtout à cause de l’emprise de leurs propres élites compradores et de la complicité de leurs dirigeants. La logique reste la même : on exploite, on détourne, on pactise avec l’étranger. La souveraineté économique est sacrifiée sur l’autel des contrats signés dans des palaces dorés.

Il est temps de sortir de cette hypnose collective. Le vrai débat n’est pas de savoir si Trump générera 1 000 milliards de dollars en contrats, mais qui contrôlera demain les cerveaux artificiels qui pilotent nos données, nos économies, nos politiques. L’IA ne doit pas être une rente pour les puissants, mais un levier de justice économique, d’émancipation collective, et de transparence démocratique.