L’administration Trump envisage de rejeter automatiquement des centaines de milliers de demandes d’asile déposées par des migrants entrés illégalement sur le sol américain, accélérant leur expulsion sans audience ni recours juridique.



Selon une enquête révélée par CNN, ce projet controversé marquerait un tournant radical dans la politique migratoire des États-Unis. Le département de la Sécurité intérieure (DHS), dirigé par Kristi Noem, prépare en effet une directive permettant à l’USCIS (Services de citoyenneté et d’immigration des États-Unis) de clore sans préavis les dossiers de demandeurs d’asile ayant franchi illégalement la frontière, pour les transférer immédiatement en procédure d’expulsion accélérée.

Le plan s’appuierait sur un chiffre vertigineux : 1,45 million de demandes d’asile en attente, dont près de 250 000 concernent des personnes ayant reconnu une entrée irrégulière. Au lieu d’être examinées au cas par cas, ces demandes seraient balayées administrativement par l’USCIS, jusque-là chargé de l’accueil, de la naturalisation et de la délivrance des visas. Ce changement de rôle transforme l’agence en un outil d’exécution migratoire au même titre que l’ICE (Immigration and Customs Enforcement), ce que dénoncent fermement les défenseurs des droits humains.

Pour Conchita Cruz, codirectrice de l’Asylum Seeker Advocacy Project, cette stratégie “remet en cause le droit fondamental à demander l’asile”. Elle rappelle que beaucoup de demandeurs vivent et travaillent légalement aux États-Unis, souvent depuis plusieurs années, et qu’ils méritent d’être entendus par un juge. “On ne peut pas rayer l’existence d’un individu par une simple décision administrative sans examen équitable”, alerte-t-elle dans une interview accordée à CNN.

L’American Civil Liberties Union (ACLU), par la voix de sa directrice adjointe Sarah Mehta, dénonce quant à elle “la militarisation d’une agence censée défendre les droits des migrants”. Selon elle, l’USCIS devient une “extension directe de l’ICE”, au détriment des principes fondateurs du système d’asile américain.

Ce durcissement s’inscrit dans un contexte plus large de pression sur les procédures d’immigration. Les juges sont désormais encouragés à rejeter les dossiers jugés “juridiquement faibles” sans convoquer de comparution, et les expulsions accélérées ont été généralisées à tous les migrants ne pouvant prouver deux ans de résidence continue sur le territoire.

Si la réforme est formalisée dans les prochaines semaines, elle pourrait mettre fin à des milliers d’histoires de vie, d’intégration, et d’espoir. Car derrière chaque dossier administratif se cache une famille, un parcours, et souvent, une fuite vers la liberté. En redéfinissant brutalement les règles du jeu, l’administration Trump risque de bafouer un pan entier du droit d’asile — l’un des piliers du droit international humanitaire.