L'accord entre les États-Unis et le Vietnam, qui réduit les droits de douane tout en imposant des sanctions sur le transbordement de marchandises chinoises, déclenche l’ire de Pékin. Derrière cette entente commerciale se profile une stratégie géoéconomique visant à fragmenter les chaînes d’approvisionnement mondiales et isoler la Chine.



Les tensions montent dans le paysage du commerce mondial. L’administration Trump vient de conclure un accord commercial avec le Vietnam qui, au-delà des apparences diplomatiques, révèle une volonté assumée : affaiblir l’influence économique de la Chine en Asie et remodeler les chaînes d’approvisionnement à l’avantage de Washington.

L’accord prévoit une réduction des tarifs américains sur les produits vietnamiens, passant de 46 % à 20 %, et instaure une taxe punitive de 40 % sur les marchandises réexportées depuis d’autres pays, une clause perçue comme visant directement la Chine, soupçonnée de transborder ses produits via le Vietnam pour contourner les barrières douanières américaines. Pékin, par la voix de son ministère du Commerce, a dénoncé un « acte hostile déguisé en coopération économique » et prévient contre une fragmentation dangereuse du commerce international.

Pour le Vietnam, qui réalise près de 30 % de ses exportations vers les États-Unis, cet accord constitue un compromis stratégique. Hanoï évite des sanctions plus lourdes mais au prix d’un alignement plus net sur la politique commerciale américaine. Plusieurs analystes y voient une victoire à court terme, mais une dépendance accrue et une pression à long terme sur ses relations avec la Chine.

Ce n’est pas une première. Depuis le début de l’année, Washington a multiplié les accords bilatéraux avec ses alliés, comme celui signé avec le Royaume-Uni en mai, imposant des normes drastiques sur l’acier et les médicaments, là encore perçues comme des mesures anti-Chine. Ces manœuvres s’inscrivent dans une stratégie de découplage ciblé, où l’accès au marché américain est conditionné à un éloignement progressif des réseaux commerciaux chinois.

Les économistes Mark Williams et Gareth Leather de Capital Economics alertent : « Pour rester dans les bonnes grâces de Washington, certains pays devront choisir entre les avantages d’un commerce libre avec les États-Unis ou leur partenariat stratégique avec la Chine. »

L’incertitude demeure sur plusieurs points de l’accord USA-Vietnam : le taux de 20 % sera-t-il définitif ou cumulé à d’autres droits ? Quels produits seront spécifiquement ciblés par les sanctions sur le transbordement ? Pour Pékin, ces zones d’ombre masquent une volonté de remodeler l’ordre économique mondial au détriment de son rôle central.

Si la stratégie américaine semble bénéficier à court terme à des pays comme le Vietnam, elle installe une nouvelle ère de rivalités commerciales où chaque accord pourrait devenir un levier géopolitique. Et pour les marchés, c’est désormais une guerre d’influence économique qui se joue — avec pour enjeu, la redéfinition des règles du commerce mondial.